CHAPITRE 17 / DE NOUVEAUX AMIS

 

VT17 ch17/De nouveaux amis

Ils traversèrent le paysage de petites collines. Le ciel était d’un bleu clair aveuglant et la neige gelée envoyait des milliers d’éclairs scintillants, agressant et piquant les yeux des pourchassés. Ils marchaient d’un pas rapide, essayant d’enfoncer le moins possible dans la neige croûtée afin d’économiser leur énergie. Seul le Comte traînait la jambe, volontairement sans doute, espérant la venue rapide de ses hommes. Dick, qui veillait au grain, se chargeait de le faire avancer, sortant les crocs et émettant des grognements qui en disaient long. Ils atteignirent l’orée de la forêt lorsque Jordan, qui menait le groupe, se retourna et désigna le château.

- Les voilà, ils n’ont pas mis trop de temps à se reprendre. Nous les aurons bientôt sur le dos.

- Ah ! ah ! se mit à rire le Comte, vous n’êtes pas encore tirés d’affaire. Et cette fois, je ne vous ferai pas de cadeau. Vous serez tous éliminés !

Les trois hommes ne répondirent pas à ces propos menaçants et, pressant le pas, ils s’engagèrent dans la forêt.

Les enfants suivaient, commençant à fatiguer. Daîna tremblait, mais on ne savait pas si c’était de froid ou de peur.

‘ Quand je vais raconter tout ça à l’école, pensa-t-elle, ils ne vont pas en revenir.’ Mais l’école, pour l’instant, elle était loin dans le temps et dans l’espace. La reverrait-elle seulement ? Avec ce fou qui les accompagnait et ces cavaliers en armes qui les pourchassaient.

Ils avaient déjà traversé un bon tiers de la forêt lorsque les buissons bas commencèrent à s’agiter. La troupe s’arrêta, aux aguets. Dick humait l’air, le museau levé, les pattes tendues, les oreilles couchées en arrière comme un chien qui a senti un danger. En effet, de derrière les buisson surgit une horde de loups composée d’au moins une douzaine de solides spécimens. Des loups brun-noir, aux museaux effilés, aux yeux jaunes. Leur respiration rapide dégageait des petits nuages de vapeur blanchâtre. Ils s’étaient arrêtés à une dizaine de mètres de la petite troupe.

‘ Aïe, pensa Daîna, les cavaliers derrière, les loups devant, on ne va pas rigoler ‘.

- Ne bougez pas, souffla Jim, pas de geste brusque.

- Et alors ? demanda Jonathan, on va attendre qu’ils nous mangent tout crus ?

- Panique pas gamin, avec les loups on peut toujours discuter.

C’est ce que dut comprendre Dick, qui, quittant le groupe, s’avança résolument vers le loup qui devait être le mâle dominant de la horde. Ils se tenaient tous deux face à face, à quelques mètres de distance, les oreilles en arrière, les pattes tendues, les babines découvrant des crocs acérés.

- Qu’est-ce que tu crois qu’ils vont faire ? demanda Daîna.

- Je ne sais pas, répondit Jonathan, mais j’ai confiance en ce chien.

Soudain, les deux animaux se jetèrent l’un sur l’autre. Dans des grognements presque insupportables qui troublaient le silence de cette forêt, les crocs cherchaient à prendre l’adversaire à la gorge. Les combattants roulaient au sol, se décochaient coups de pattes et coups de gueules. Si le loup semblait mieux armé, le chien était plus leste et plus rapide. Il évitait soigneusement les attaques de son adversaire et décochait de temps à autre un coup qui fatiguait le loup. La petite troupe, médusée par ce spectacle, ne bougeait pas. Les autres loups, impassibles, assis sur leurs arrière-trains, attendaient la fin du combat.

Finalement, au bout d’un bon quart d’heure de lutte épuisante pour les deux animaux, le loup, haletant, se coucha au pied du berger allemand. Le chien lui posa l’une de ses grosses pattes sur le thorax. Il avait vaincu.

- Je te l’avais dit, dit Jonathan, c’est un super-chien !

Dick releva sa patte et se mit à lécher les blessures de son adversaire. Un spectacle incroyable. Ensuite, il se dirigea vers les autres membres de la horde et s’asseyant dans la neige, leur faisant face, il les scruta les uns après les autres. Sans doute un message devait-il passer. Ce manège dura un bon moment. La petite troupe laissait faire, sidérée par ce qu’elle voyait. Dick n’était pas venu pour dominer mais pour demander de l’aide.

Puis il se retourna, s’avança fièrement vers ses compagnons. Les loups l’imitèrent et vinrent, les uns après les autres, se frotter aux jambes des compagnons, sans agressivité aucune.

- Hi ! hi ! faisait Daîna , mais on ne savait pas si c’était de peur ou de surprise.

Jonathan caressait les museaux des loups et Dick se frottait contre ses jambes.

- Et bien, les enfants, déclara Jim, je crois que nous avons la clef de notre problème. Nos nouveaux amis vont s’occuper des cavaliers qui approchent.

- Ah ! ah ! ah ! se mit à rire le Comte, si vous pensez que …

Il n’acheva pas sa phrase, un énorme loup, aux dents acérées comme des lames de couteau s’était approché de lui, lui faisant comprendre qu’il valait mieux en rester là.

Les cavaliers s’étaient rapprochés, ils étaient maintenant dans la forêt, à quelques centaines de mètres seulement. C’est Dick qui prit la conduite des opérations. On ne savait pas comment il pouvait communiquer avec les loups, mais cela se fit. La horde se dispersa en arc de cercle, se dissimulant derrière les grands arbres. La troupe, toujours en attente, se trouvait au centre d’une clairière lorsque la vingtaine de cavaliers surgit. Les armures noires, les casques mordorés, les épées levées, tout cela n’était pas de bon augure. Le Comte aurait bien aimé prévenir ses hommes mais l’un des loups restait fidèlement attaché à sa surveillance. Alors surgirent les bêtes. En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, les cavaliers furent mis à bas de leurs montures. Les crocs se plantaient dans les poignets, les genoux, les chevilles, dans l’interstice du casque. Les hommes furent décimés en quelques instants et il ne resta plus au sol qu’une vingtaine de corps inanimés. Chose remarquable, aucun des chevaux n’avait été blessé.

Les loups se regroupèrent autour de Dick qui semblait leur adresser ses félicitations pour cette action rondement menée. Le Comte pestait et l’on sentait monter en lui une rage indicible .

- Désolé, Monsieur le Comte, dit Jordan, mais nous n’y sommes vraiment pour rien. Ce sont ces animaux qui…

- J’aurai ma revanche, vous verrez que…

Le loup affecté à sa surveillance montra les crocs une fois de plus.

- Et bien, les enfants, nous allons rejoindre le ‘Condor’, sans embûches cette fois.

Mais avant de reprendre le chemin, Dick s’avança vers le chef de la horde.

- Je pense que Dick va décider de ce qu’il veut faire, dit Jim.

- Comment ça ? demanda Jonathan.

- Il faut qu’il choisisse. Soit venir avec nous, soit rester avec ses nouveaux amis. Laissons faire.

Le chien fixait son ancien adversaire. Les autres loups formaient un cercle et ne bougeaient pas. Les deux animaux se frottèrent le museau, se donnèrent de légers coups de pattes sur les flancs puis Dick rejoignit Jonathan en se frottant contre ses jambes et en lui léchant les mains.

- Je crois qu’il vient avec nous, dit Jonathan. Salut les loups, je ne vous oublierai pas.

- Moi non plus, ajouta Daîna, qui tremblait toujours.

Sur ce, ils regagnèrent le ‘Condor’.

 

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