CHAPITRE 13/ LE CHATEAU DE MAUVALLON

 

VT13 ch13/Le Château de Mauvallon

Les trois hommes étaient perplexes et Jonathan inquiet. Comment le Redresseur du Temps, l’homme au pistolet, avait-il pu réapparaître à cette époque sous les traits du soit-disant Comte de Mauvallon  alors qu’il était censé s’être perdu à jamais en 1793.

- Peut-être la clef ? dit Jim.

- Oui, la clef dorée qu’il avait emportée. Mais théoriquement, cela ne suffit pas pour nous repérer et nous rejoindre ici.

- En attendant, nous voilà bien avancés. Daîna est entre ses mains et…

- Et nous n’avons pas d’autre choix que de nous rendre à son ‘invitation’, au château. C’est la seule chance qu’il nous reste de récupérer Daîna et de nous débarrasser une fois pour toutes de ce malfaisant.

Jonathan était bien d’accord. Il sentait monter en lui une forte volonté de se battre pour sauver sa camarade des griffes de ce sinistre personnage.

Il fut décidé de rejoindre le ‘Condor’ afin de faire le point. Là, ensemble, ils chercheraient une solution si solution il y avait. Prendre le problème par le bon bout, s’armer de volonté et de force mentale, déjouer les pièges de l’adversaire. Ils traversèrent, dans l’autre sens cette fois, la forêt de hêtres, aperçurent en passant le majestueux cerf rouge, qui sauvé des loups, grignotait quelques rameaux d’un jeune chêne. Cela leur redonna espoir. Cet animal, tout à l’heure si près de son trépas, avait retrouvé la paix. Lui aussi dans une situation auparavant inconfortable voire sans issue avait conservé la vie grâce, en fait, à ceux qui maintenant menaçaient les quatre compagnons. Incroyable, mais parfois la vie est faite de ces situations bizarres et étonnantes à la fois dont il faut profiter, qu’il faut pousser un peu dans le bon sens avec le concours de Dame Chance.

Ils avaient passé et repassé le problème dans tous les sens. La situation n’était guère enviable. Il fut décidé de se rendre au château et après avoir pris un copieux repas, chacun s’endormit pour reprendre des forces et surtout se préparer à l’affrontement du lendemain.

Ils quittèrent le ‘Condor’ le lendemain après-midi. Ils s’engagèrent une nouvelle fois dans la forêt et croisèrent, une fois de plus, le grand cerf rouge. Peut être un bon signe du destin.

Une fois la forêt traversée, ils découvrirent un paysage de petites collines, recouvertes de neige bien sûr, sur lesquelles, ça et là, de grands arbres tendaient vers le ciel leurs branches tortueuses. Enfin, ils approchèrent du château dont les quatre tours d’angle se dressaient à plus de cinquante mètres de hauteur. Un fossé, dont l’eau était gelée, entourait l’ensemble de l’édifice. On accédait à la porte principale par un pont-levis alors abaissé. Même la herse était levée. Ce qui semblait dire qu’ils étaient attendus. Ils s’arrêtèrent sur le seuil et ôtèrent leurs combinaisons, les rangeant dans leurs sacs à dos. Il est vrai qu’ils n’en avaient pas besoin pour la circonstance. Ils avaient, à la place, revêtu des laines polaires et Jonathan se plaignit une fois de plus de la taille trop grande du vêtement. Mais au moins il ne souffrait pas du froid assez vif. D’ailleurs il ne tenait pas à attraper le rhume ou une grippe car il serait obligé de manquer l’école. Le maître lui demanderait sûrement un mot d’excuse. Que dire ? ‘ excusez-moi, Maître, j’ai pris froid au Moyen-Age ‘.

Il laissa là ses réflexions car une troupe de gardes en armes, une vingtaine, se positionna le long du porche d’entrée, sans mot dire, tandis que du fond de la cour centrale, le Comte de Mauvallon, alias le Redresseur du Temps, faisait son apparition. Il était escorté de deux colosses aux longues chevelures rousses tombant sur les épaules, des espèces de Schwarzenenger aux visages patibulaires. Chacun d’eux portait une longue épée et un poignard. Ils étaient vêtus d’un plastron de cuir épais sur une cotte de maille scintillante. Quant au Comte de Mauvallon, il portait un ample manteau pourpre et était coiffé d’un petit chapeau de feutre vert à deux cornes. Il affichait un sourire de satisfaction. Il se planta devant les quatre compagnons.

- Bienvenue au Château de Mauvallon ! Je suis heureux de vous recevoir…

- Trêve de balivernes, dit Jordan, nous sommes ici pour récupérer l’enfant que vous avez enlevée !

- Ne me coupez pas la parole ! Je suis le Maître ici  et il pourrait vous en cuire ! Un seul ordre et je vous fais jeter au cachot ou encore découper en petits morceaux par mes fidèles gardes. Ils n’ont pas beaucoup de cervelle mais sont très habiles un couteau en main.

Jordan ne se laissa pas impressionner pour autant.

- Encore du bluff ! Vous savez bien que sans nous vous ne pouvez rejoindre votre époque.

- Que vous croyez, mais je vous en prie, entrons, nous serons mieux à l’intérieur pour discuter de toutes ces choses.

Tournant les talons, il retraversa la cour centrale, gagnant une porte de bois massif. Les gardes l’accompagnaient et les compagnons se dirent qu’il n’y avait pas autre chose à faire pour le moment que de le suivre.

Ils traversèrent une immense salle aux murs et à la voûte de pierre, empruntèrent un escalier aux marches de granit, débouchèrent dans une autre salle faiblement éclairée par de petites ouvertures rectangulaires. Les murs de pierre brute étaient par endroit recouverts de tentures d’épais tissus pourpres. Une grande table de chêne occupait le centre de cette pièce. Au fond, un siège de bois à accoudoirs dont le dossier était décoré de l’emblème du Comte. Des gardes, surgissant d’une petite porte découpée dans l’angle gauche, s’empressèrent d’apporter des sièges. Le Comte s’installa dans son fauteuil tandis qu’il faisait signe aux compagnons de s’asseoir.

Il y eut un moment de silence avant que le Comte ne prenne la parole.

- Oui, je sais, vous devez vous demander, à juste titre d’ailleurs, comment il se fait que j’ai réussi à vous retrouver. Comment il se fait aussi que je sois le Comte de Mauvallon. Eh bien, tout cela est très simple. Lors de l’exécution de Louis XVI, souvenez-vous, j’étais en possession de la clef dorée du ‘Condor’. Ce n’est pas qu’une clef, c’est aussi une formidable banque de données. Elle peut suivre le vaisseau pas à pas et permettre, dans certaines conditions de le rejoindre. Ces conditions, je les ai trouvées en faisant faire, chez un tailleur de Paris, une sorte de combinaison de laine très épaisse adjointe de fines feuilles de métal, genre cotte de maille. Ceci, afin de m’isoler suffisamment pour ne pas risquer de me retrouver haché en menus morceaux lors de mon transfert. Avec un peu de cuivre récupéré chez un artisan, j’ai pu confectionner quelques câblages rudimentaires mais efficaces. Quant à l’énergie électrique, si ces gens du XVIII° siècle ne l’avaient pas encore maîtrisée, il me fut facile avec un peu de plomb, de cuivre, d’acide, de constituer une petite batterie pour faire ‘parler’ la clef.

Les compagnons avaient écouté avec attention. Assurément, ce personnage était intelligent et débrouillard. Ces desseins sombres et inquiétants un faisaient donc un personnage dangereux avec lequel il allait falloir compter.

- Monsieur le Comte, dit Jim avec une pointe d’ironie, vous êtes habile. J’ai peur cependant que vos projets ne vous aveuglent et vous perdent à jamais. Mais nous ne continuerons cette entrevue que lorsque nous aurons vu Daîna.

- Ne vous inquiétez pas, elle ne devrait pas tarder.

En effet, une tenture pourpre s’écarta, découvrant une autre petite porte par laquelle Daîna, accompagnée d’un garde, pénétra dans la salle. Aussitôt, le visage radieux, elle s’élança vers ses compagnons.

- Assieds-toi Daîna, lui dit Phil, lui présentant un siège.

- Ils ne t’ont pas fait de mal, au moins ? demanda Jonathan.

- Non, ça va, j’ai pu manger et me reposer un peu.

- Tant mieux, repris Jonathan, sinon ils auraient vu de quel bois je me chauffe !

Et Daîna se mit à rire, comme à son habitude.

 

accueil<<<>>>
1/ 2/ 3/ 4/ 5/ 6/ 7/ 8/ 9/ 10/ 11/ 12/ 13/ 14/ 15/ 16/ 17/ 18/ 19/ 20/ 21

 

un autre site, du même auteur-------->
...( Les aventures du Lieutenant Braint)...